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certains baux, dit-il[1], où l’on prescrit au fermier un mode de culture, où on le charge aussi d’observer une succession particulière de récoltes pendant toute la durée du bail. Cette condition, qui est presque toujours l’effet de l’opinion qu’a le propriétaire de la supériorité de ses propres connaissances (opinion très mal fondée la plupart du temps), doit être regardée comme un surcroît de fermage, comme une rente en services, au lieu d’une rente en argent. Pour décourager cette pratique qui, en général, est une sottise, on pourrait évaluer cette sorte de rente de quelque chose plus haut que les rentes ordinaires en argent et, par conséquent, l’imposer un peu davantage. — Quelques propriétaires, au lieu d’une rente en argent, exigent une rente en nature, en grain, bestiaux, volaille, vin, huile, etc. D’autres aussi exigent une rente en services. De pareilles rentes sont toujours plus nuisibles au fermier qu’elles ne sont avantageuses pour le propriétaire. Elles ont l’inconvénient d’ôter au premier plus d’argent qu’elles n’en donnent à l’autre, ou au moins de tenir l’argent hors des mains du fermier, sans profit pour le propriétaire. Partout où elles ont lieu, les tenanciers sont pauvres et misérables, et précisément selon que cette pratique est plus ou moins générale. En évaluant de même ces sortes de rentes plus haut que les rentes ordinaires en argent et, par conséquent, en les taxant de quelque chose plus haut, on parviendrait peut-être à faire tomber un usage nuisible à la société. — Quand le propriétaire aime mieux faire valoir par ses mains une partie de ses terres, on pourrait évaluer sa rente d’après une estimation arbitrale faite par des fermiers et des propriétaires du canton, et lui accorder une réduction raisonnable de l’impôt, comme c’est l’usage dans le territoire de Venise, pourvu que le revenu des terres qu’il ferait valoir n’excédât pas une certaine somme. Il est important que le propriétaire soit encouragé à faire valoir par lui même une partie de sa terre. Son capital est généralement plus grand que celui du tenancier, et, avec moins d’habileté, il peut souvent donner naissance à un plus gros produit. Le propriétaire peut, sans se gêner, faire des essais, et il est en général disposé à en faire. Une expérience qu’il aura faite sans succès

  1. Rich., liv. V, ch. II (t. II, p. 509).