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nière de l’autre pays. Il reste ici, au point de vue économique, fidèle à ses principes et il spécifie que cette mesure ne doit être que temporaire, puisqu’elle est une charge pour les consommateurs sans être un dédommagement pour ceux des producteurs qui se sont trouvés atteints par les taxes prohibitives de la nation voisine. « Quand il n’y a pas probabilité, dit-il, que nous puissions parvenir à faire révoquer ces empêchements, c’est, à ce qu’il semble, une mauvaise méthode pour compenser le dommage fait à quelques classes particulières du peuple, que de faire nous-mêmes un autre dommage tant à ces mêmes classes qu’à presque toutes les autres. Quand nos voisins prohibent quelqu’un de nos objets de manufacture, en général nous prohibons non seulement leurs ouvrages du même genre, ce qui seul ne pourrait pas produire grand effet chez eux, mais quelques autres articles du produit de leur industrie. Cette mesure, sans doute, peut donner de l’encouragement à quelques classes particulières d’ouvriers chez nous, et, en évinçant ainsi quelques-uns de leurs rivaux, elle peut mettre ces ouvriers à même d’élever leurs prix dans le marché intérieur. Néanmoins la classe d’ouvriers qui souffre de la prohibition faite par nos voisins, ne tirera pas d’avantages de celle que nous faisons. Au contraire, les ouvriers et presque toutes les autres classes de citoyens se trouveront par là obligés de payer certaines marchandises plus cher qu’auparavant. Aussi toute loi de cette espèce impose une véritable taxe sur la totalité du pays, non pas en faveur de cette classe particulière d’ouvriers à qui cette prohibition faite par nos voisins a porté dommage, mais en faveur de quelque autre classe. »


Sauf ces trois dérogations qu’il s’est attaché à renfermer dans d’étroites limites, Smith n’accepte aucune restriction à la liberté du commerce : c’est elle qui est l’auxiliaire le plus puissant de la civilisation et qui, en respectant l’ordre naturel des choses, en livrant l’homme à ses aspirations, à ses tendances, en mettant en jeu le stimulant puissant de son intérêt personnel et de sa responsabilité, le conduit le plus sûrement au progrès, à la multiplication de ses consommations, à la satisfaction progressive de tous ses besoins.