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DE GÉOLOGIE.

l’action des courans était assez puissante, à plus de quatre-vingts pieds de profondeur, pour déplacer des pierres pesant douze cents livres.

L’observation prouve que sur toutes les côtes, les eaux de la mer charrient des sables des galets : elles rongent les montagnes, y forment des falaises…

Il n’est donc pas douteux que ces eaux n’agissent sur le fond du sol, sur lequel elles reposent. Mais jusqu’à qu’elle profondeur cette action s’étend-elle ? C’est ce que les faits ne décident pas d’une manière précise.

Dicquemare pensait que l’action des eaux était assez puissante sur les côtes du Hâvre, et dans toute la Manche, pour changer le fond de la mer. Il distinguait, en conséquence, deux fonds dans cette mer : l’un qu’il appelait permanent, et qu’il regardait comme le véritable fond, et l’autre qu’il appelait changeant[1].

Daprés avait étendu cette observation à toutes les mers[2].

Pour prouver leur opinion, ils disent l’un et l’autre que les sondes, jetées à différentes époques dans les mêmes endroits, apportaient des terrains différens. Les marins, ajoutent-ils, en avaient été induits souvent en erreur. Ils croyaient n’être plus dans le même lieu, voyant que la sonde ne rapportait pas la même nature de terrain.

Daprés et Dicquemare prétendent, au contraire, s’être bien assurés que la sonde, jetée à différentes époques dans le même endroit, apportait souvent des terrains différens, ce qu’ils attribuent aux dépôts que les eaux charrient continuellement. Ces nouveaux dépôts forment un fond factice, qui change chaque fois que les eaux l’emportent pour y apporter de nouvelles substances ;

  1. Journal de Physique de décembre 1775, pag. 438, et novembre 1781, pag. 395.
  2. Neptune oriental, par M. Daprès, imprimé en 1775.