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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.
jamais inspirer. La musique est un plaisir si passager, on le sent tellement s’échapper à mesure qu’on l’éprouve, qu’une impression mélancolique se mêle à la gaieté qu’elle cause. Mais aussi quand elle exprime la douleur, elle fait encore naître un sentiment doux, le cœur bat plus vite en l’écoutant ; la satisfaction que cause la régularité de la mesure, en rappelant la brièveté du temps, donne le besoin d’en jouir. »


12 septembre. — L’oncle Riesener et son fils[1], avec Henri Hugues[2], sont venus nous surprendre ici, et je passe des journées amusantes. J’ai été ému d’un grand plaisir, quand, nous trouvant à dîner chez le curé voisin, on est venu nous annoncer qu’ils étaient là.

J’ai pris ces jours-ci la résolution d’aller chez M. Gros[3], et cette idée m’occupe bien fortement et agréablement.

  1. Henri-François Riesener, peintre miniaturiste, élève de Hersent et de David, était fils de Jean-Henri Riesener, l’ébéniste célèbre par ses beaux meubles en marqueterie. Il eut lui-même un fils, Léon Riesener, cousin germain par conséquent d’Eugène Delacroix, peintre d’histoire, auquel Delacroix laissa par testament sa maison de campagne de Champrosay avec ses dépendances et les meubles qui la garnissaient.
    Riesener encouragea son neveu Eugène Delacroix à ses débuts. Ce fut lui qui lui conseilla l’atelier de Guérin.
  2. Henri Hugues était un cousin de Delacroix ; son nom reparaîtra à maintes reprises dans le cours du Journal. Il existe de lui un très beau portrait peint par Delacroix, dans la manière flamande, mais ébauché seulement par parties. Ce portrait appartient actuellement à madame Léon Riesener ; il avait été offert par son mari au Louvre, qui, nous ne savons pour quelle raison, le refusa.
  3. Dans le volume tiré à un petit nombre d’exemplaires et qui con-