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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

qui est à droite en venant du bout du parc. Beautés des eaux.

Revenus par Ourville. En remontant de Cany, belle vue. Tons de cobalt apparaissant dans les masses de verdure du fond et parfois doré des devants. Vu à Cany M. Foy, vieilli comme les autres.

Jeudi 11 octobre. — À Fécamp l’après-midi.

Nous allions surtout pour voir Mme Laporte[1] ; j’y suis arrivé seul, en attendant Bornot et sa femme. La pauvre dame ne voulait d’abord recevoir personne, mais en apprenant mon nom, elle m’a fait venir près d’elle ; je l’ai trouvée dans ce qui était sa salle à manger sans doute, parce que cette pièce est au rez-de-chaussée et plus à portée pour les soins que son état exige, mais seule dans un petit lit, toute diminuée elle-même et dans un grand état de maigreur. Elle a éprouvé beaucoup de sensibilité en me voyant ; je lui rappelais des moments et des personnes disparus depuis longtemps, au moment où elle sent bien qu’elle va tout quitter à son tour. J’ai tenu avec plaisir sa main maigrie et ridée.

Bornot et sa femme sont survenus. Elle nous a parlé de ses maux, ce qui est tout simple, mais avec une grande liberté, plaisantant même avec cette humeur qu’elle a toujours eue. Nous l’avons quittée au bout de quelques instants. Ce spectacle m’a beaucoup touché.

  1. Madame Laporte, veuve de l’ancien consul de France à Tanger.