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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

ment du discours de Barbès[1] devant ses juges. On voit dans les discours de ces gens-là tout le faux et tout l’ampoulé qui est dans leurs pauvres et coupables têtes ; c’est bien toujours la race écrivassière, l’affreuse peste moderne qui sacrifie tranquillement un peuple à des idées de cerveau malade.

« Le but, dit-il, est tout. Sans doute le suffrage universel était quelque chose et avait installé cette Chambre, mais et cette Chambre, et le gouvernement provisoire qui l’avait précédée, sorti aussi, à ce qu’ils croient, d’une espèce de vœu général, tout cela ne lui a pas paru devoir être soutenu, bien plus, lui a semblé devoir être renversé, du moment qu’on s’écartait du but que Barbès avait fixé dans son esprit, malheureusement sans nous prévenir de ce but admirable. Il préfère donc la prison, le cachot plutôt que la douleur d’assister, sans y pouvoir rien changer, à cette déviation sacrilège de ce but suprême de l’humanité.  »

Il faudra bien, bon gré, mal gré, que l’humanité finisse par suivre les sublimes aspirations de Barbès.

Dans le discours de Blanqui, quelques jours auparavant, les images prétendues poétiques à la moderne

  1. Barbès, qui avait pris une part active à l’insurrection du 15 mai 1848 contre la représentation nationale, avait été arrêté et traduit avec ses coaccusés devant la haute cour de Bourges, sous l’inculpation de complot tendant au renversement du gouvernement républicain. Devant la cour, Barbès parla à diverses reprises non pour se défendre, mais sur les faits généraux de la cause. Il fut condamné, le 2 avril 1849, à une détention perpétuelle.