Page:Delacroix - Journal, t. 1, éd. Flat et Piot, 2e éd.djvu/406

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
330
JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.

Il faudrait faire ainsi des tableaux esquisses qui auraient la liberté et la franchise du croquis. Les petits tableaux m’énervent, m’ennuient ; de même les tableaux de chevalet, même grands, faits dans l’atelier ; on s’épuise à les gâter. Il faudrait mettre dans de grandes toiles, comme Cournault me disait qu’était la Bataille d’Ivry de Rubens, à Florence, tout le feu que l’on ne met d’ordinaire que sur des murailles.

La manière appliquée à la figure de l’Italie est très propre pour faire des figures dont la forme serait aussi rendue que l’imagination le désire, sans cesser d’être colorées, etc.

La manière de Prud’hon s’est faite en vue de ce besoin de revenir sans cesse, sans manquer à la franchise. Avec les moyens ordinaires, il faut toujours gâter une chose pour en obtenir une autre ; Rubens est lâché dans ses Naïades, pour ne pas perdre sa lumière et sa couleur. Dans le portrait de même : si l’on veut arriver à une extrême force d’expression et de caractère, la franchise de la touche disparaît, et avec elle la lumière et la couleur. On obtiendrait des résultats très prompts et jamais de fatigue. On peut toujours reprendre, puisque le résultat est presque infaillible.

La cire m’a beaucoup servi pour cette figure, afin de faire sécher promptement et revenir à chaque instant sur la forme. Le vernis copal peut remplir cet objet ; on pourrait y mêler de la cire.

Ce qui donne tant de finesse et d’éclat à la peinture