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JOURNAL D’EUGÈNE DELACROIX.


Jeudi 1er avril. — Été le matin avec Champmartin chez Cogniet, où j’ai déjeuné.

J’ai vu le masque moulé de mon pauvre Géricault. Ô monument vénérable ! J’ai été tenté de le baiser… sa barbe… ses cils… Et son sublime Radeau ! Quelles mains ! Quelles têtes ! Je ne puis exprimer l’admiration qu’il m’inspire.

— Vu Fedel chez lui. — Retrouvé Fedel, comme je me disposais à aller voir l’Italiana in Alaeri[1]. Endormi toute la soirée.

— Peindre avec brosses courtes et petites. Craindre le lavage à l’huile.

— Il me survient le désir de faire une esquisse du tableau de Géricault. Dépêchons-nous de faire le mien. Quel sublime modèle ! et quel précieux souvenir de cet homme extraordinaire !

Vendredi 2 avril. — À l’atelier toute la journée. Arrêté en partie mon fond.

M. Coutan est venu me voir. Il m’a donné envie de voir les dessins de Demeulemeester[2].

    en 1862, dans la Revue des Deux Mondes. « Son talent n’avait point eu d’aurore, il est arrivé tout armé, pourvu de ce don d’imaginer et d’exécuter qui fait les grands artistes. Il a même cela de remarquable que la première période de son talent est celle où ce talent est le plus magistral. Dans les sujets aussi simples et, ce qu’il y a de plus difficile, dans la représentation de scènes vulgaires dont les modèles sont sous nos yeux, Charlet a le secret d’unir la grandeur et le naturel. » (Revue des Deux Mondes, 1er juillet 1862.)

  1. Italiana in Algeri, opéra italien de Rossini.
  2. Charles Demeulemeester, graveur belge, élève de Bervic, né Bruges en 1771, mort en 1836. Il avait fait à Rome en 1806 des copies