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Alors je me disposai à me rendre au navire. Je dis néanmoins au capitaine que je resterais encore cette nuit pour faire mes préparatifs, et que je désirais qu’il retournât cependant à son bord pour y maintenir le bon ordre, et qu’il m’envoyât la chaloupe à terre le lendemain. Je lui recommandai en même temps de faire pendre au taquet d’une vergue le nouveau capitaine, qui avait été tué, afin que nos bannis pussent le voir.

Quand le capitaine fut parti, je fis venir ces hommes à mon logement, et j’entamai avec eux un grave entretien sur leur position. Je leur dis que, selon moi, ils avaient fait un bon choix ; que si le capitaine les emmenait, ils seraient assurément pendus. Je leur montrai leur capitaine à eux flottant au bout d’une vergue, et je leur déclarai qu’ils n’auraient rien moins que cela à attendre.

Quand ils eurent touts manifesté leur bonne disposition à rester, je leur dis que je voulais les initier à l’histoire de mon existence en cette île, et les mettre à même de rendre la leur agréable. Conséquemment je leur fis tout l’historique du lieu et de ma venue en ce lieu. Je leur montrai mes fortifications ; je leur indiquai la manière dont je faisais mon pain, plantais mon blé et préparais mes raisins ; en un mot je leur enseignai tout ce qui était nécessaire pour leur bien-être. Je leur contai l’histoire des seize Espagnols qu’ils avaient à attendre, pour lesquels je laissais une lettre, et je leur fis promettre de fraterniser avec eux[1].

Je leur laissai mes armes à feu, nommément cinq mousquets et trois fusils de chasse, de plus trois épées, et environ

  1. Ici, dans certaine édition, est intercalé, à propos d’encre, un petit paragraphe fort niais et fort malencontreux, qui ne se trouve point dans l’édition originale de Stockdale. P. B.