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bien. Je lui fabriquai ensuite une casaque de peau de chèvre aussi bien que me le permit mon savoir : j’étais devenu alors un assez bon tailleur ; puis je lui donnai un bonnet très-commode et assez fashionable que j’avais fait avec une peau de lièvre. Il fut ainsi passablement habillé pour le moment, et on ne peut plus ravi de se voir presque aussi bien vêtu que son maître. À la vérité, il eut d’abord l’air fort empêché dans toutes ces choses : ses caleçons étaient portés gauchement, ses manches de casaque le gênaient aux épaules et sous les bras ; mais, ayant élargi les endroits où il se plaignait qu’elles lui faisaient mal, et lui-même s’y accoutumant, il finit par s’en accommoder fort bien.

Le lendemain du jour où je vins avec lui à ma huche je commençai à examiner où je pourrais le loger. Afin qu’il fût commodément pour lui et cependant très-convenablement pour moi, je lui élevai une petite cabane dans l’espace vide entre mes deux fortifications, en dedans de la dernière et en dehors de la première. Comme il y avait là une ouverture donnant dans ma grotte, je façonnai une bonne huisserie et une porte de planches que je posai dans le passage, un peu en dedans de l’entrée. Cette porte était ajustée pour ouvrir à l’intérieur. La nuit je la barrais et retirais aussi mes deux échelles ; de sorte que Vendredi n’aurait pu venir jusqu’à moi dans mon dernier retranchement sans faire, en grimpant, quelque bruit qui m’aurait immanquablement réveillé ; car ce retranchement avait alors une toiture faite de longues perches couvrant toute ma tente, s’appuyant contre le rocher et entrelacées de branchages, en guise de lattes, chargées d’une couche très-épaisse de paille de riz aussi forte que des roseaux. À la place ou au trou que j’avais laissé pour entrer ou sortir avec mon