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symphonique en quatre parties (œuvre de jeunesse, je crois), où perce déjà l’indépendance future de R. Strauss. Les développements m’en ont paru un peu longs et convenus. Cependant la troisième partie, intitulée : « En rade de Sorrente », est d’une bien jolie couleur… Ensuite, une scène d’amour extraite de Feuersnot, son dernier opéra. D’être ainsi détachée de son cadre fait perdre beaucoup à cette scène ; puis comme le programme ne contenait aucune indication, l’ordonnance en était totalement incompréhensible. Tel épisode qui soulevait des torrents d’orchestre paraissait bien formidable pour une scène d’amour ! Il est probable que dans le drame, ce torrent est justifié. Voici peut-être une occasion pour les théâtres de musique de monter quelque chose de nouveau ; car je ne pense pas qu’on ait la prétention de nous apprendre quoi que ce soit en jouant les opéras modernes de la jeune Italie ?

M. R. Strauss n’a ni mèche folle, ni des gestes d’épileptique. Il est grand et a l’allure franche et décidée de ces grands explorateurs qui passent à travers les tribus sauvages avec le sourire sur les lèvres. — Il faut peut-être avoir un peu de cette allure pour secouer la civilisation du public ? — Son front est tout de même d’un musicien, mais les yeux et le geste sont d’un « Sur-homme », comme disait celui qui doit être son professeur d’énergie : Nietzsche… Il a dû lui prendre aussi son beau dédain