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SUR LA RÉVOLUTION FRANÇOISE

roit disposé. Le roi n’avoit pas reçu une éducation militaire, et tous les ministres du monde, y compris le cardinal de Richelieu, ne sauroient suppléer, à cet égard, à l’action personnelle d’un monarque. On peut écrire pour lui, mais non commander une armée à sa place, surtout quand il s’agit de l’employer dans l’intérieur. La royauté ne peut être conduite comme la représentation de certains spectacles, où l’un des acteurs fait les gestes pendant que l’autre prononce les paroles. Mais quand la plus énergique volonté des temps modernes, celle de Bonaparte, se seroit trouvée sur le trône, elle se seroit brisée contre l’opinion publique, au moment de l’ouverture des états généraux. La politique étoit alors un champ nouveau pour l’imagination des François ; chacun se flattoit d’y jouer un rôle, chacun voyoit un but pour soi dans les chances multipliées qui s’annonçoient de toutes parts ; cent ans d’événements et d’écrits divers avoient préparé les esprits aux biens sans nombre que l’on se croyoit prêt à saisir. Lorsque Napoléon a établi le despotisme en France, les circonstances étoient favorables à ce dessein ; on étoit lassé de troubles, on avoit peur des maux horribles qu’on avoit soufferts, et que le retour