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II[1]


Ci commence une complainte amoureuse.


Vueillez oÿr en pitié ma complainte,
Belle plaisant pour qui j’ay douleur mainte
Et que j’aour plus que ne saint ne sainte,
Chose est certaine ;
Et ne cuidez que ce soit chose fainte,
Trés doulce flour dont je porte l’emprainte
Dedens mon cuer pourtraicte, escripte et painte.
Car la grant peine
Du mal d’amours qui pour vous me demaine
Me grieve tant, de ce vous acertaine,
Que plus vivre ne puis jour ne sepmaine,
Dont par contrainte
Dire me fault a vous, ma souveraine,
Le trés grant faiz dont ma pensée est plaine,
Bonne, belle, tout le vous dis je a peine
Et en grant crainte.

Et se je crains, doulce dame, a le dire
Merveilles n’est, car qui vouldroit eslire
En tout le mond sans trouver a redire
Une parfaicte
Haulte dame pour estre d’un empire
Couronnée, si devroit il souffrir
De vous, souvraine, ou tout honneur se tire ;
Maiz, trés doulcette
Jouvencelle, que mon cuer tant regraitte,

  1. Cette complainte ne se trouve que dans le ms. Harley 443 1 du Musée Britannique, fol. 48b