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Ne mon penser nulle heure ne s’en part.

Mon doulx ami, qui es comble et monjoye
De tout honneur et bonté, il m’est tart
Qu’entre mes bras briefment je te festoye,
Ne mon penser nulle heure ne s’en part.



XLV[1]


Par ta valour et par ton maintien saige,
Par ta doulceur et trés plaisant maniere.
Et les grans biens et l’amoureux langaige
Qui en toy sont, tu as m’amour entiere
En tout, en tout acquise en tel maniere
Que sans cesser je ne pensse autre part.
Adès m’est vis que devant moy te voye.
Ne nulle heure le mien cuer ne s’en part.
Mon doulx amy, d’autre ne me vient joye.

Sy as tant fait que mon cuer, qui sauvaige
D’amours estoit, et qui ne faisoit chiere
D’amer Jamais, ore est ou doulx servage
Du dieu d’amours, si qu’estre ne puis fiere
N’a luy n’a toy, ains convient que plainiere-
Ment me soye donnée sans départ
A toy, amis, n’est rayson je doye
Desobeïr au bien qu’il me départ.
Mon doulx amy, d’autre ne me vient joye,

Et puis qu’Amours, par son hault seigneurage,
Veult que tous deux soions soubz sa baniere,
Or lui faisons de trés bon cuer hommage
Sans départir, amis, en tel manière
Que soies mien, et plus ne seray liere

  1. XLV. — Omise dans A2