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II


Il y avait dix mois que le comte Samuel vivait un rêve d’amour, lorsque de pressants intérêts le forcèrent à entreprendre un court voyage.

Après avoir vingt fois recommandé sa chère femme à son frère, il partit accompagné d’un seul domestique, en se promettant bien de ne pas prolonger son absence. Cette première séparation lui coûtait comme si elle eût dû être éternelle.

Olivier le reconduisit jusqu’à l’entrée du bourg, et s’en revint l’âme remplie d’une souffrance imprécise, qu’il ne pouvait définir mais qui l’accablait.

« Serait-ce un pressentiment ? se demandait-il. Mais il pensait aussitôt : je suis fou, Samuel ne court aucun danger ; les routes sont sûres dans ces parages, et un valet dévoué l’accompagne. »

Il parvint à chasser ses noires idées, et comme il passait devant la demeure du duc d’Alombrès, ses réflexions prirent un autre cours. « Voilà un chevalier qui n’est plus si pressé d’aller batailler pour ses principes, pensa le gentilhomme ; puisque sa sœur a maintenant, le meilleur des protecteurs, pourquoi s’obstine-t-il dans cette vie végétative, qui semblait tant lui peser ? Je me souviens de la mauvaise impression que cet