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MÉMOIRES.

Quand bien même les messieurs du séminaire de Québec eussent voulu choisir dans tout le Canada une résidence propre à délasser de leurs études, pendant leurs vacances, les élèves de leur maison d’éducation, ils auraient en vain cherché un autre asile champêtre où tout fut mieux réuni pour cet objet. Ceux qui aimaient la chasse n’avaient qu’à sortir armés d’un fusil, et le gibier ne leur faisait jamais défaut. Les tourtes étaient en si grande abondance qu’on les tuait à la porte du château, et les perdrix à une quinzaine d’arpents. En outre, les grèves étaient couvertes de toutes espèces de gibiers.

Quand à ceux dont les goûts plus paisibles faisaient préférer la pêche à la chasse, une petite rivière, dont les eaux limpides coulent sur le domaine même, leur fournissait journellement des truites en abondance. Mais le lieu de prédilection des pêcheurs était sur le sommet du cap Tourmente même. L’étranger, qui contemple de loin le géant des Laurentides, est loin de soupçonner qu’il porte sur sa tête superbe un lac pittoresque d’une demi-lieue de tour.

À ce souvenir toutes les jouissances du jeune âge se présentent à mon imagination réveillée tout à coup de l’engourdissement produit par le poids des années. Une vingtaine d’écoliers partent un jeudi dès l’aurore pour le lac, un paquet sur le dos et une ligne à la main, pour régaler, le lendemain, toute la communauté d’excellentes truites. Les novices portent en outre un petit cadeau pour la vieille femme qui tient un cabaret sur la montagne, à une demie lieue du lac, et que l’on appelait « la bonne femme du cabaret. » Après avoir esca-