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LES ANCIENS CANADIENS.

— Certainement ; il est notaire ambulant ; il parcourt tous les trois mois certaines localités, passant de nouveaux actes et expédiant des copies de ses minutes qu’il porte toujours avec lui, pour n’être pas pris au dépourvu. C’est un excellent et très aimable homme, Français de naissance et plein d’esprit. Il commença par faire, à son arrivée au Canada, un petit commerce d’images peu profitable ; et puis, se rappelant qu’il avait étudié jadis pendant deux ans chez un clerc d’avoué en France, il se présenta bravement devant les juges, passa un examen, si non brillant, du moins assez solide pour sa nouvelle patrie ; et s’en retourna triomphant chez lui avec une commission de notaire dans sa poche. Je t’assure que tout le monde s’accommode très bien de ses actes rédigés avec la plus scrupuleuse honnêteté : ce qui supplée à une diction plus pure, mais souvent entachée de mauvaise foi, de certains notaires plus érudits (g).

— Votre notaire nomade, reprit Arché en souriant, arrive fort à propos : j’ai de la besogne pour lui.

En effet de Locheill, déjà très avancé dans l’œuvre de défrichement qu’il poursuivait avec activité au profit de son ami Dumais, lui fit un transport en bonne et due forme, de tous ses immeubles ; se réservant seulement, sa vie durant, la moitié de la nouvelle et vaste maison qu’il avait construite.

Les visites d’Arché au manoir d’Haberville devinrent plus fréquentes à mesure qu’il avançait en âge ; et il finit même par s’y fixer lorsque l’amitié la plus pure eut remplacé le sentiment plus vif qui avait obscurci les beaux jours de sa jeunesse. Blanche ne fut désormais aux yeux d’Arché que sa sœur par adoption : et le