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LES ANCIENS CANADIENS.

ma foi, le tout vous appartiendra. J’ai fait vœu de rester garçon.

— Les hommes comme vous, fit Dumais, sont trop rares : il serait cruel que la race vînt à s’en éteindre. Mais je commence à comprendre qu’au lieu de songer à vous, c’est à moi et à ma famille que vous pensez, et que c’est nous que vous voulez enrichir.

— Parlons maintenant à cœur ouvert, reprit Arché ; je n’ai de vrais amis dans le monde que la famille d’Haberville et la vôtre.

— Merci, monsieur, dit Dumais, de nous mettre sur la même ligne, nous pauvres cultivateurs, que cette noble et illustre famille.

— Je ne considère dans les hommes, repartit de Locheill, que leurs vertus et leurs bonnes qualités. Certes, j’aime et respecte la noblesse ; ce qui ne m’empêche pas d’aimer et respecter tous les hommes estimables, et de leur rendre la justice qu’ils méritent. Mon intention est de vous donner le quart de ma fortune.

— Ah ! monsieur, s’écria Dumais.

— Écoutez-moi bien, mon ami. Un gentilhomme ne ment jamais. Lorsque je vous ai dit que j’avais ce que vous appelez des peines d’esprit, je vous ai dit la vérité. J’ai trouvé le remède contre cette affreuse maladie : beaucoup d’occupations et de travail manuel ; et ensuite faire du bien à ceux que j’aime. Mon intention est donc de vous donner, de mon vivant, un quart de ma fortune ; gare à vous, Dumais : je suis persévérant et entêté comme un Écossais que je suis ; si vous me chicanez, au lieu du quart, je suis homme à vous en donner la moitié. Mais pour