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CONCLUSION.

— Vous êtes le bienvenu, lui dit-il en le saluant, vous qui m’apportez des nouvelles d’un homme qui m’est si cher.

— Vous êtes, sans doute, le sergent Dumais ? dit de Locheill.

— Et vous M. Arché ! s’écria Dumais en se jetant dans ses bras : croyez-vous que je puisse oublier la voix qui me criait « courage, » lorsque j’étais suspendu au-dessus de l’abîme, cette même voix que j’ai entendue tant de fois pendant ma maladie ?

— Mon cher Dumais, reprit Arché, vers la fin de la veillée, je suis venu vous demander un grand service.

— Un service ! fit Dumais ; serais-je assez heureux, moi pauvre cultivateur, pour être utile à un gentilhomme comme vous ? ce serait le plus beau jour de ma vie.

— Eh bien, Dumais, il ne dépendra que de vous de me rendre la santé : tel que vous me voyez, je suis malade, plus malade que vous ne pensez.

— En effet, dit Dumais, vous êtes pâle et plus triste qu’autrefois. Qu’avez-vous, mon Dieu ?

— Avez-vous entendu parler, repartit de Locheill, d’une maladie, à laquelle les Anglais sont très sujets, et que l’on appelle le spleen ou diable bleu ?

— Non, fit Dumais ; j’ai connu plusieurs de vos Anglais, qui, soit dit sans vous offenser, paraissaient avoir le diable au corps, mais je les aurais crus, ces diables, d’une couleur plus foncée.

Arché se prit à rire.

— Ce que l’on appelle, mon cher Dumais, diable bleu, chez nous, est ce que vous autres Canadiens appelez peine d’esprit.

— Je comprends, maintenant, dit Dumais ; mais