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LES ANCIENS CANADIENS.

Arché de Locheill, que vous avez connu autrefois ; peut-être l’avez-vous oublié.

Madame Dumais se rapprocha de l’étranger ; l’examina pendant quelque temps en silence, et dit :

— Il y a assurément une certaine ressemblance ; vous êtes, sans doute, un de ses parents ? Oublier M. Arché ! oh ! ne dites pas qu’il nous croit capables d’une telle ingratitude ! ne savez-vous donc pas qu’il s’est exposé à une mort presque certaine pour sauver la vie de mon mari, que nous prions tous les jours le bon Dieu de le conserver, d’étendre ses bénédictions sur notre bienfaiteur ! oublier M. Arché ! vous m’affligez beaucoup, monsieur.

De Locheill était très attendri. Il prit sur ses genoux la petite Louise, âgée de sept ans, la plus jeune des enfants de Dumais, et lui dit en la caressant :

— Et toi, ma belle petite, connais-tu M. Arché ?

— Je ne l’ai jamais vu, dit l’enfant, mais nous faisons tous les jours une prière pour lui.

— Quelle est cette prière ? reprit Arché.

« Mon Dieu, répandez vos bénédictions sur M. Arché, qui a sauvé la vie à papa, s’il vit encore ; et s’il est mort, donnez-lui votre saint paradis. »

De Locheill continua à s’entretenir avec Madame Dumais jusqu’à ce que celle-ci, entendant la voix de son mari près de la grange, courut lui dire qu’un étranger l’attendait à la maison pour lui donner des nouvelles de M. Arché. Dumais, qui se préparait à décharger sa charrette, jeta sa fourche, et ne fit qu’un saut de la grange à la maison. Il faisait déjà brun, quand il entra, pour l’empêcher de distinguer les traits de l’étranger.