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LES ANCIENS CANADIENS.

vant encore au milieu de ce qu’il avait de plus cher au monde. Jules pour y faire diversion s’empressa de dire :

— C’est moi qui en ai apporté une jolie chanson de France.

— Ta jolie chanson ! s’écria-t-on de toutes parts.

— Non, dit Jules, je la réserve pour ma bonne amie mademoiselle Vincelot, à laquelle je veux l’apprendre.

Or, la dite demoiselle, déjà sur le retour, avait depuis quelques années montré des sentiments très hostiles au mariage, partant un goût prononcé pour le célibat ; mais il était connu qu’un certain veuf, qui n’attendait que le temps nécessaire au décorum, pour convoler en secondes noces, avait vaincu les répugnances de cette tigresse, et que le jour même des épousailles était déjà fixé. Cette ennemie déclarée du mariage ne se pressait pas de remercier Jules, dont elle connaissait l’espièglerie, et gardait le silence ; mais l’on cria de toutes parts :

— La chanson ! la chanson ! et tu en feras ensuite hommage à Élise.

– Ça sera, après tout, comme vous le voudrez, dit Jules : elle est bien courte, mais elle ne manque pas de sel.

Une fille est un oiseau
Qui semble aimer l’esclavage,
Et ne chérir que la cage
Qui lui servit de berceau,
Mais ouvrez-lui la fenêtre ;
Zest ! on la voit disparaître
Pour ne revenir jamais. (bis)

On badina Élise, qui comme toutes les prudes, prenait assez mal la plaisanterie, ce que voyant madame d’Haberville, elle donna le signal usité, et on