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LES ANCIENS CANADIENS.

ancêtres. Sa position, d’ailleurs, est bien différente de la mienne : ce qui serait lâcheté chez moi, sur le bord de la tombe, n’est qu’un acte de devoir pour lui qui commence à peine la vie. Il a payé glorieusement sa dette à l’ancienne patrie de ses ancêtres ! Il se retire avec honneur d’un service que les médecins déclarent incompatible avec sa santé. Qu’il consacre donc maintenant ses talents, son énergie au service de ses compatriotes Canadiens. Le nouveau gouverneur est déjà bien disposé en notre faveur, il accueille avec bonté ceux de mes compatriotes qui ont des rapports avec lui, il a exprimé, en maintes occasions, combien il compatissait aux malheurs de braves officiers, qu’il avait rencontrés face à face sur le champ de bataille, et que la fortune, et non le courage, avait trahis (g). Il a les mêmes égards, dans les réunions au château Saint-Louis, pour les Canadiens que pour ses compatriotes, pour ceux d’entre nous qui ont perdu leur fortune, que pour ceux plus heureux qui peuvent encore s’y présenter avec un certain luxe : ayant soin de placer chacun suivant le rang qu’il occupait avant la conquête. Sous son administration, et muni en outre des puissantes recommandations que notre ami de Locheill lui a procurées, Jules a tout espoir d’occuper un poste avantageux dans la colonie. Qu’il prête serment de fidélité à la couronne d’Angleterre ; et mes dernières paroles dans nos adieux suprêmes seront : « Sers ton souverain anglais avec autant de zèle, de dévouement, de loyauté, que j’ai servi le monarque français, et reçois ma bénédiction (h). »

Tout le monde fut frappé de ce revirement si soudain dans les sentiments du chef de famille : on ne