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UNE NUIT AVEC LES SAUVAGES.

entonné sa chanson de mort comme un homme. Ils nous auraient remerciés de les pendre : il n’y a que le guerrier sauvage qui préfère le bûcher à la honte d’être pendu comme un chien (f).

— Que mon frère écoute, dit Dumais, et qu’il fasse attention aux paroles du visage-pâle. Le prisonnier n’est pas Anglais, mais Écossais ; et les Écossais sont les sauvages des Anglais. Que mon frère regarde le vêtement du prisonnier, et il verra qu’il est presque semblable à celui du guerrier sauvage.

— C’est vrai, dit la Grand’-Loutre : il n’étouffe pas dans ses habits comme les soldats anglais et les soldats du Grand Ononthïo qui demeure de l’autre côté du grand lac ; mais, qu’est-ce que ça y fait ?

— Ça y fait, reprit le Canadien qu’un guerrier écossais aime mieux être brûlé que pendu. Il pense, comme les peaux rouges du Canada, qu’on ne pend que les chiens, et que s’il visitait le pays des âmes la corde au cou, les guerriers sauvages ne voudraient pas chasser avec lui.

— Mon frère ment encore, dit l’Indien en secouant la tête d’un air de doute : les sauvages écossais sont toujours des visages-pâles, et ils ne doivent pas avoir le courage de souffrir comme les peaux-rouges.

Et il continu à fumer d’un air pensif.

— Que mon frère prête l’oreille à mes paroles, reprit Dumais, et il verra que je dis la vérité.

— Parle ; ton frère écoute.

— Les Anglais et les Écossais, continua le Canadien, habitent une grande île de l’autre côté du grand lac ; les Anglais vivent dans la plaine, les Écossais dans les montagnes. Les Anglais sont aussi nombreux que les grains de sable de ce lac, et les Écossais que