Page:De Coster - Contes brabançons, 1861.djvu/234

Cette page a été validée par deux contributeurs.

meurait silencieux comme un muet et se contentait de la regarder quand elle ne le regardait pas. Ser Huygs ne s’était point voulu montrer à lui, de peur que sa présence ne le fit entrer en colère et n’empêchât ainsi sa guérison.

Roosje disait souvent à Mahom :

— Ha, monsieur, que ne voulez-vous pardonner à mon frère le mal qu’il vous fit, comme il vous pardonne celui que vous lui voulûtes faire, cela vous guérirait bien plus vite.

Et le Maure hochant la tête disait :

— Femme pour femme, et après rentrait en son silence.

Mais Roosje repartait vivement :

— S’il vous faut de toute nécessité prendre femme en ce pays, il en est peut-être qui voudraient de vous, monsieur. Mais il vous faudrait pour ce ne point retourner aux sables brûlants d’où vous venez, et, ajoutait-elle, il y a là, montrant Jésus cloué à la croix, il y a là un pauvre bon Dieu qui mourut pour vous, monsieur, comme pour moi, et qui vous ferait heureux si vous vouliez.

— Allah est grand, disait Mahom.

— Allah ne vous aime point du tout, répondait Roosje bien malicieusement, car il a souffert que votre femme vous fût prise et que vous fussiez blessé deux fois. Las !