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Il n’y a gueres de ſervices qu’un bon ſujet & un fidele Miniſtre ne doive à ſon Prince ou à la patrie, cependant l’obèiſſance a ſes bornes, & elle ne s’étend pas juſqu’à agir contre les Loix de Dieu & de la juſtice, qui ne permettent point d’attenter à la vie d’un Prince, de lui faire revolter ſes ſujets, d’uſurper ſes États ou de les troubler en y excitant des guerres civiles lorſqu’on y a été recû ſous le titre d’amitié ; un Ambaſſadeur doit détourner par ſes Conſeils de pareilles entrepriſes, & ſi le Prince ou l’État y perſiſte, l’Ambaſſadeur peu & doit alors demander ſon rappel & garder cependant le ſecret à ſon Souverain.

Il faut rendre juſtice à la plupart des legitimes Souverains, en difant, qu’il y en a très-peu qui ſe portent d’eux-mêmes à de ſemblables deſſeins ; preſque toutes les entrepriſes injuſtes & les cabales qu’on fait en leur nom dans les autres États leur ſont ſuggerées par les Miniſtres ou par quelques Negociateurs qui les y engagent en s’offrant