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LES FRANÇAIS ET SAINT-CASTIN

assez de sévérité et les pêcheurs anglais écartaient peu à peu les Français. « Les Anglais de Boston ruinent la pêche sur les côtes de l’Acadie », constatait Frontenac le 2 novembre 1681. De Meulles notait en 1686 : « Plus de 800 bâtiments anglais viennent impunément pêcher sur les côtes de l’Acadie. Salem, à 5 lieues de Boston, est leur grand centre de sécheries ». D’après un auteur anglais, ils prenaient sur les côtes acadiennes de 80 000 à 100 000 quintaux de poisson qu’ils vendaient au Portugal, dans la Méditerranée, aux Antilles, prenant sans vergogne l’argent de ces chiens de papistes. Seule, la guerre pouvait arrêter un commerce si profitable. On la leur fit au moyen des corsaires.

Nelson se plaignait amèrement : « Comme sir William Temple prélevait un droit de cinq livres par bateau de pêche, les Français s’autorisent à en faire autant et même à saisir les bateaux qui pêchent sans autorisation », écrivait-il aux lords du commerce en 1697, sans expliquer pourquoi les Français n’auraient pu faire, chez eux, ce que Temple accomplissait en pays conquis.

Le gouverneur de la Nouvelle-France protestait, en 1698, auprès de son collègue Stoughton du Massachusetts, lui annonçant que ses navires seraient de bonne prise. Un mémoire de 1790 nous apprend que, « avec leur sans-gêne habituel, ces Anglais se considèrent en cette terre française comme chez eux : ils viennent sécher et saler à terre ». Le ministre autorisa Villebon à prélever un droit de 50 livres par bateau, mais, à cause de la tolérance antérieure, le Conseil de Boston réclamait les droits dont jouissaient les Français sur les pêcheries. En 1700, lord Bellomont s’écriait : « Je souffre à l’idée que la Nouvelle-Écosse est aux mains des Français, et c’est bien plutôt à cause de ses pêcheries qu’à cause de son sol même ».


Les Anglais faisaient le commerce ouvertement en Acadie, depuis l’occupation de 1654. Talon réclamait en 1671, en vue d’y mettre fin, l’envoi de France ou de Québec des objets nécessaires et l’échange avec les Antilles du poisson, du bois et du blé contre les mélasses. Mais la France n’organisa jamais ces échanges.

Le 28 novembre 1700, Bellomont écrivait aux lords du commerce : « Boston fait le commerce de façon inin-