Page:Daviault - La Grande aventure de Le Moyne d'Iberville, 1934.djvu/15

Cette page a été validée par deux contributeurs.
16
LA GRANDE AVENTURE DE LE MOYNE D’IBERVILLE

baiser ». On l’avait surnommée Parmanda. Le vocable était passé dans le fond du vocabulaire intime de sa fille adoptive.

Cette fille a aussi le parler vert. Devenue dame, elle se surveille, mais le naturel jaillit sous le coup d’une forte émotion. Alors, elle n’y va pas par le dos de la cuiller, comme on dit. Elle en a trop vu dans la vie. La belle Catherine Thierry, qui prit le nom de son oncle Primot quand celui-ci la fit venir de Rouen pour l’adopter, a été la beauté de la petite ville naissante. Ce temps est loin. Elle a épousé, puis aimé le rude fils d’un cabaretier de Dieppe qui avait tellement vécu parmi les sauvages qu’il avait fini par leur ressembler à plus d’un égard : dans les tribus, on l’appelait Akouessan, la Perdrix. Elle a partagé ses travaux, ses dangers, ses inquiétudes ; puis ses succès et sa prospérité quand, intermédiaire obligé entre les gouvernants et les indigènes, il devint tout un personnage, ambassadeur auprès des naturels du pays, commandant de la milice, procureur du roi et grand commerçant avec son beau-frère Jacques Le Ber, le richard de la colonie. Elle eut un moment d’orgueil quand, anobli, le couple ajoutait à son nom roturier celui d’un petit patelin de Normandie, que portait un chevalier venu autrefois au Canada et que s’appropria Charles Le Moyne, en modifiant l’orthographe : de Longueil