pain à la troupe, pour ne lui laisser que de la bouillie avec un peu de lard.
Les explorateurs sont convaincus. Mais il faut des preuves pour persuader les sceptiques de Paris. D’Iberville ira chercher ces preuves.
En biscayenne, Pierre Le Moyne remonte le fleuve. Voyage rude. Il n’en fait jamais d’autres. Un courant rapide charrie des troncs d’arbres entre des rives noyées de deux pieds. Peu de vivres. Mais les voyageurs tuent parfois un crocodile ou un serpent qu’ils mettent au pot, ou bien des sauvages leur donnent de l’ours boucané en échange de rassades. Les cannes couvrant la terre brûlent facilement et « faisoient autant de bruit comme un coup de pistolet ». Dans la nuit chaude, ils s’éveillent en sursaut, croyant à une escarmouche. La capitale des Bayogoulas et des Mougoulachas, alliés, s’annonce par une odeur épouvantable, des nuées de corbeaux. Puis apparaissent les poteaux, à l’entrée du village, surmontés de cadavres enveloppés de nattes : c’est le cimetière.
Les deux chefs viennent au-devant de l’explorateur, suivis de leurs gens chantant sans interruption. Le Mougoulacha porte un capot bleu à la canadienne : il lui vient de Tonti-Main d’argent,