Page:Daviault - La Grande aventure de Le Moyne d'Iberville, 1934.djvu/102

Cette page a été validée par deux contributeurs.
103
À LA BAIE D’HUDSON

encore soutenir la gloire que l’on s’étoit acquise deux jours auparavant ; et périr pour périr il valoit mieux sacrifier sa vie aux pieds d’un bastion du fort de Nelson, que de languir dans un bois où il y avoit déjà un pied de néges ».

La Potherie et les gens valides se rendent en canot jusqu’à l’eau basse. Renvoyant l’embarcation, ils se jettent ensuite à la mer jusqu’aux épaules, le mousquet et la corne à poudre au-dessus de la tête. Pendant ce temps, le commandant « faisoit faire des Rats d’eau et des cayeux pour sauver les malades ». Accablés par le froid et la fatigue du long combat qu’ils viennent de soutenir contre l’Anglais et les éléments, nos gens mangent de l’herbe flottant sur la mer. Dix-huit périssent. Les autres se traînent sur un banc de neige où Bacqueville de la Potherie se laisse tomber d’inanition, mais les Canadiens le raniment. « Nous campâmes dans un bois et fîmes de grands feux qui nous furent d’un grand secours, car nous étions tous sans autre habit qu’un casaquin assez léger, et tout dégoûtant de notre naufrage ». Ils ont sauvé la poudre, par bonheur. La chasse les empêche de mourir de faim. Mais la situation n’est pas rose. Ils décident de risquer le tout pour le tout dans un assaut contre le fort. « Nous décampâmes le lendemain du Camp de Grâce (tel fut son nom) et passâmes par un marais d’où les