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faut pas craindre de l’écrire), une révolution dans le monde des idées.

On en connaît le thème. Le jeune intellectuel Robert Greslou est l’admirateur fanatique du philosophe Adrien Sixte, « iconoclaste des idoles spiritualistes ». Il entreprend une « expérience psychologique » sur la jeune fille d’une famille où il est précepteur. Quand elle découvre la vérité, la jeune fille s’empoisonne de désespoir. Greslou est arrêté comme assassin ; le frère de la victime, au courant de tout, demande l’acquittement de l’assassin mais, au sortir du tribunal, l’abat d’un coup de pistolet. Et le philosophe Sixte, à qui Greslou a fait parvenir son journal, apprend avec étonnement l’influence de ses doctrines.

Bourget se révélait tout entier dans ce livre. Non seulement il y étudiait un « cas », mais il posait le problème de la responsabilité intellectuelle. Telle était la démarche habituelle de sa pensée : rien ne lui plaisait comme de « tenir » un enchaînement de causes qui projetait une vive lumière sur une vie d’homme. Près de cinquante ans après le Disciple, il publiait Nos actes nous suivent, où l’on retrouve la même préoccupation.

Le livre eut un retentissement énorme. Dans les milieux intellectuels du temps, on n’avait jamais songé qu’une œuvre d’art dût tenir compte des conséquences qu’elle entraînait. Comme dit Victor Giraud, « le Disciple a détaché l’une de l’autre deux générations successives ».

Taine, le maître de Bourget, qui se reconnaissait avec raison dans le philosophe Sixte, écrivit au romancier une lettre douloureuse, d’où nous détacherons ces passages :