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ministre de l’Intérieur, Plehve. Constatant l’activité grandissante des révolutionnaires, Plehve songea qu’une bonne petite guerre apporterait la diversion nécessaire. La victoire achèverait de consolider le pouvoir. Aussi ne se gêna-t-on point. Le Japon se rebiffa et le tsar déclara la guerre. On sait quel résultat pitoyable il obtint.

Les hostilités terminées par une défaite écrasante, la révolution gronda dans les rues de la capitale russe. Dirigées par le moine Gapone, provocateur au service de la police, les hordes populaires se dirigèrent vers le palais impérial. Une décharge des fusils de la troupe dispersa le rassemblement, mais consacra la désaffection du peuple à l’égard du « petit père le tsar ».

Le grand-duc Serge, oncle de Nicholas, était gouverneur de Moscou. Il régnait par la terreur. Un jour, un anarchiste lança une bombe sur sa voiture et le grand-duc fut tué. Quand la nouvelle de l’attentat parvint au château de Peterhof, où se trouvait la cour, le prince Frédéric-Léopold de Prusse s’habillait pour le dîner. « Naturellement, dit-il à l’aide-de-camp qui lui apportait la nouvelle, le dîner intime est décommandé ». On alla aux renseignements. Le dîner n’était pas décommandé. Le prince de Prusse acheva de s’habiller et descendit au salon. Le tsar et le grand-duc Alexandre s’y trouvaient déjà et riaient à gorge déployée. Le dîner fut extrêmement gai. Le prince de Prusse dit à quelqu’un : « Le tsar ignore encore l’attentat ? — Non, l’impératrice douairière lui a communiqué la nouvelle ». Le Prussien regarda avec effroi l’empereur riant : « Incompréhensible, murmura-t-il, absolu-