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En dépit du Saint Synode et des dignitaires de l’Église, il canonisa Séraphime au mépris de toutes les lois ecclésiastiques et il institua un culte exagéré au nouveau saint. Quand le tsarevitch naquit enfin, le tsar ne voulut pas entendre les gens qui venaient lui représenter que Séraphime n’avait peut-être pas eu une vie exemplaire.

C’est le même mysticisme, éloigné de la réalité, qui devait donner naissance à la fatale guerre avec le Japon, en 1904. Nicholas aimait d’un amour mystique les régions extrême-orientales de son empire. Il rêvait au jour où la puissante paysannerie sibérienne conquerrait l’Orient païen et ajouterait à l’éclat de la couronne russe. Déjà, l’influence de la Russie se faisait sentir puissamment dans l’Orient. La Russie ne dominait-elle pas en Mandchourie ? N’avait-elle pas construit une forteresse à Port-Arthur, en plein territoire chinois ?

Le tsar voulut annexer la Corée à son empire. Un capitaine de cavalerie de la garde, Besobrasov, élabora un mirifique projet de conquête pacifique : une compagnie, semblable à l’ancienne compagnie anglaise des Indes, devait accomplir toute la besogne. Moscou fut pris d’un enthousiasme fou, le tsar devint actionnaire de la compagnie. Mais madame Besobrasov disait dans les salons : « Je n’arrive pas à comprendre comment mon mari peut jouer un rôle aussi considérable. On ne s’est donc pas aperçu que c’est un demi-fou ? » Elle ne savait pas que seuls les fous ou les demi-fous plaisaient au tsar.

Ce que le tsar ne savait pas, lui, c’est qu’un peuple de l’Orient était sorti de la léthargie et se préparait, dans le silence, à faire sentir sa puissance.

La guerre eut pour cause aussi les désirs du