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où il allait inaugurer la salle Carnegie, il reçut de Nadejda une lettre dans laquelle elle lui disait que, ruinée, elle ne pouvait plus lui être d’aucune utilité. Tchaïkovski répondit que, même si elle ne pouvait plus lui envoyer d’argent, elle serait toujours son appui moral. Il ne reçut pas de réponse.

Plus tard, Tchaïkovski apprit que la fortune des von Meck n’avait reçu aucune atteinte. Ce fut un rude coup pour le musicien. Il se dit que la jeune veuve ne l’avait jamais aimé et que, en grande dame opulente, elle avait charmé ses loisirs de campagnarde par cette innocente aventure avec le grand homme. Il avait été son jouet, son passe-temps. Mais il se refusa à le croire et il écrivit une lettre passionnée à son amie. On lui renvoya la lettre, en lui faisant savoir que Nadejda était malade, de corps et d’esprit. Ce fut la fin. Tchaïkovski ne tenta plus de communiquer avec Mme von Meek. Il comprenait que ce qu’il avait pris pour une amitié idéale n’avait été qu’une farce dont il était la victime.

Ce que Tchaïkovski ne savait pas, c’est que le fils de Nadejda avait été gravement malade et avait vu sa raison s’éteindre. La mère, persuadée qu’elle avait négligé son enfant pour s’occuper du lointain ami, en éprouvait un remords qui prenait la force qu’on imagine dans cette âme de Russe étrange et passionnée. Pour ne pas tourmenter le musicien, elle lui cacha cet incident. Quatre ans plus tard, elle mourait, inconsolée.

Un autre musicien célèbre, Claude Debussy, fut en relation avec Mme von Meck. En 1880, celle-ci demandait au directeur du Conservatoire de Paris de lui envoyer un jeune pianiste qui pourrait