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I. — UNE ENTREVUE


Le Père Jérôme Lalemant, supérieur des Jésuites de la Nouvelle-France, était assis, par un beau matin d’août 1660, à sa table de travail, chargée de papiers et de documents. Il achevait de lire, le front soucieux, une lettre venue de Montréal et apportée par le bac, « d’où étaient descendues, il y avait peu d’heures, plusieurs personnes », lui avait-on appris. On frappe à la porte. On l’avertit qu’un visiteur l’attendait au parloir.

Aussitôt, le Père replie la lettre, puis passe la main sur son front, afin d’en chasser tout nuage. La courtoisie était parfaite chez ce religieux. Fort intelligent, imposant, sa direction spirituelle était recherchée, par la plus humble chrétienne, comme par l’étonnante contemplative, Mère Marie de l’Incarnation. Il comptait environ soixante ans et au delà de vingt ans de séjour au Canada.

D’un pas vif encore, le Père Lalemant traversa un petit couloir, tout en devisant en lui-même : « Bah ! pensait-il, toujours sous l’impression des confidences de son correspondant,