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levaient du papier, voyaient à travers les vitres ruisselantes et la brume des jours parisiens. Le soir, toutes les fenêtres serrées sur ces hautes façades s’allumaient à tous les étages, découpant des silhouettes courageuses, des attitudes penchées au travail bien avant dans la nuit, surtout vers le jour de l’an, dont ce quartier de bimbelotiers alimente les baraques et les étalages. Mais les meilleures pages s’écrivaient encore à Champrosay, où les premiers lilas nous voyaient arriver pour une villégiature souvent prolongée jusqu’aux premières neiges.

Nos maisons de Paris les mieux gardées, les plus closes, sont encore ouvertes à trop de distractions et d’imprévu. C’est l’ami qui vous apporte son souci ou sa joie, le journal du matin aux nouvelles agitantes, le gêneur éhonté qui force les consignes, et la corvée mondaine, les dîners, les premières représentations, auxquels l’observateur, le peintre de mœurs modernes n’a pas le droit de se soustraire. À la campagne, l’espace est vaste, l’air libre, le temps long, et, disposant à son gré de sa personne et de ses heures, on a