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aille !… » Puis, à la fin, il s’est couché. Maintenant, il dort, et je me suis levé doucement, doucement, pour venir vous le dire… Pourquoi me regardez-vous comme cela, ma mère ?… Ça vous étonne, que j’y voie si fin et que j’aie tant de raisonnement… Mais vous savez bien ce que Balthazar disait : « Il s’éveille, cet enfant, il s’éveille ! »

rose.

Est-ce possible ?… Oh !… ô mon Innocent !

l’innocent.

Mon nom est Janet, ma mère. Appelez-moi Janet. Il n’y a plus d’innocent dans la maison.

rose, vivement.

Tais-toi… ne dis pas ça.

l’innocent.

Pourquoi !

rose.

Ah ! je suis folle… C’est ce berger, avec ses histoires… Viens, mon chéri, viens, que je te regarde. Il me semble que je ne t’ai jamais vu, que c’est un nouvel enfant qui m’arrive. (Le prenant sur ses genoux.) Comme tu es grandi, comme tu es beau ! Sais-tu que tu ressembleras à Frédéri ? C’est qu’il y a de la vraie lumière dans tes yeux, maintenant.

l’innocent.

Ma foi ! oui, je crois que maintenant je suis éveillé tout à fait… Ce qui n’empêche pas que j’ai bien sommeil, et que je vais aller dormir, car je tombe… Voulez-vous m’embrasser encore, dites ?…