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madame jourdeuil.

D’ailleurs, vous savez, moi, je suis comme toutes les mères ; je ne vois rien d’aussi beau que les miens… Cet Henri, hein ? quel cœur ! quelle nature !…

franqueyrol.

Et quel talent !

madame jourdeuil.

Il a du talent ?

franqueyrol.

S’il en a, le bandit ; mais il y a six ans, quand je l’ai connu, ce n’était qu’un enfant encore, et c’était déjà presque un maître.

madame jourdeuil.

Ah ! dam, il tient cela de son père ! Vous savez que M. Jourdeuil a été une célébrité a son époque ; en 1825, nous avons eu une médaille. (Elle montre les lauriers académiques du panneau.) Et c’était bien plus difficile alors que maintenant.

franqueyrol, à part.

Ça doit être du père Jourdeuil, cette pensée-là.

madame jourdeuil.

Malheureusement, depuis, les années sont venues, la maladie, les chagrins, les pertes d’argent ; Jourdeuil était si bon, tout le monde l’a exploité. En avons-nous nourri, des camarades d’atelier ! J’en avais toujours quatre ou cinq à la maison. Comme il me disait quelquefois : « Que veux-tu, ma femme, je suis né les mains ouvertes, jamais je ne pourrai