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sait lire une vive impression d’originalité.

Tout cela n’était pas encore le gros public.

Les gens de théâtre pillaient bien un peu les livres des Goncourt, ce qui pour un romancier est bon signe. Mais, ces adaptations ingénieuses ne rendaient profit et gloire qu’à l’adaptateur. En dehors d’un cercle restreint en somme, après tant de beaux et bons livres, le nom des Goncourt restait presque inconnu.

Il manquait une occasion, elle se présenta. La chance semblait vouloir sourire. Un directeur lettré, M. Édouard Thierry, reçoit leur Henriette Maréchal. Trois grands actes à la Comédie-Française ! La partie était sérieuse. On allait donc enfin le tenir, ce public distrait et indifférent, plus insaisissable que Galathée ; et quand on l’aurait là, sous la main, il faudrait bien, bon gré mal gré, qu’il écoutât et qu’il jugeât. On peut ne pas lire un livre, fût-il un chef-d’œuvre, une pièce s’entend toujours.

Eh bien non, le public n’entendit pas, cette fois encore. C’était une fatalité ; il suffit d’un hasard, d’un hasard bête. Le bruit