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avec ses panneaux peints, représentant des fêtes provençales, des bergers en jaquettes fleuries, des danses au galoubet et au tambourin. La présence, familière à ses yeux d’enfant, de ces vieilleries démodées lui rappelait la maison paternelle, consacrait son nouvel intérieur dont il était à goûter le bien-être.

Dès son coup de sonnette, Fanny arrivait, soignée, coquette, « sur le pont », comme elle disait. Sa robe de laine noire, très unie, mais taillée sur un patron de bon faiseur, une simplicité de femme qui a eu de la toilette, les manches retroussées, un grand tablier blanc ; car elle faisait elle-même leur cuisine et se contentait d’une femme de ménage pour les grosses besognes qui gercent les mains ou les déforment.

Elle s’y entendait même très bien, savait une foule de recettes, plats du Nord ou du Midi, variés comme son répertoire de chansons populaires que, le dîner fini, le tablier blanc accroché derrière la porte refermée de la cuisine, elle entonnait de sa voix de contralto, meurtrie et passionnée.