Page:Daudet - Sapho, 1884.djvu/151

Cette page n’a pas encore été corrigée

et de mains comme on en a pour les enfants. C’était un peu son petit, il restait pour elle à dix ans, l’âge des petits hommes qu’on émancipe.

Lui, déjà brûlant de sa lecture, s’exaltait au charme troublant de ce beau corps si près du sien, de cette bouche fraîche au sang avivé par le grand air qui dérangeait les cheveux, les envolait au-dessus du front en délicats frisons à la mode parisienne. Et les leçons de Sapho : « toutes les femmes sont les mêmes… en face de l’homme elles n’ont qu’une idée en tête… », lui faisaient trouver provocants l’heureux sourire de la paysanne, son geste pour le retenir au tendre interrogatoire.

Tout à coup, il sentit monter le vertige d’une tentation mauvaise ; et l’effort qu’il faisait pour y résister le secoua d’un frisson convulsif. Divonne s’effrayait de le voir si pâle, les dents claquantes. « Ah ! le pauvre… il a la fièvre… » D’un geste de tendresse irréfléchi elle dénouait le grand fichu qui entourait sa taille pour le lui mettre au cou ; mais brusquement saisie, enveloppée, elle sentit la brûlure d’une caresse folle sur sa nuque, ses épaules, toute