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Etait-ce bien un sacrifice ? Ne fut-il pas au contraire soulagé d’en finir avec une existence qui lui semblait odieuse et malsaine, depuis surtout qu’il était rendu à la nature, à la famille, aux affections simples et droites ?… Sa lettre écrite sans lutte ni souffrance, il compta, pour le défendre contre une réponse qu’il prévoyait furieuse, pleine de menaces et d’extravagances, sur la tendresse honnête et fidèle des braves cœurs qui l’entouraient, l’exemple de ce père droit et fier entre tous, sur le sourire candide des petites saintes femmes, et aussi sur ces grands horizons paisibles, aux saines émanations de montagnes, ce ciel en hauteur, ce fleuve rapide et entraînant ; car en songeant à sa passion, à toutes les vilenies dont elle était faite, il lui semblait sortir d’une fièvre pernicieuse comme on en gagne à la buée des terrains marécageux.

Cinq ou six jours se passèrent dans le silence du grand coup porté. Matin et soir, Jean allait à la poste et revenait les mains vides, singulièrement troublé. Que faisait-elle ? Qu’avait-elle décidé, et, en tout cas,