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ROSE ET NINETTE

s’est passé aujourd’hui ne vous a pas un peu serré le cœur ? »

Il lui jura que non, puis avec des yeux très tendres :

« Ah ! que je voudrais vous voir libérée aussi… Je sais bien que je suis encore privé de mes filles ; mais vous allez voir que Mme La Posterolle sera moins stricte que Mme Ravaut aux jugements du tribunal et que mes enfants viendront chez moi plus souvent… Le divorce, voyez-vous, le divorce, il n’y a pas d’autre solution. »

Mais elle secouait la tête, avec le sourire triste des convictions qu’on n’atteint pas.

Les faits semblaient pourtant donner raison à Régis. Rose et Ninette accouraient plus souvent au boulevard Beauséjour et ne s’en tenaient pas aux dimanches de quinzaine. Tantôt la grande sœur, tantôt la plus jeune, en course avec Mademoiselle, tombait à l’improviste et s’installait une heure ou deux ; et, si Rose continuait à bouder les voisins, maintenant Ninette était la première à vouloir descendre au jardin et courir avec le petit Maurice qui commençait à ne plus se servir de béquilles.

« C’est drôle, disait ce jocrisse d’Anthyme à la vieille servante du dessous, on ne m’ôtera pas de l’idée que l’ancienne Madame à Monsieur le fait moucharder par ses filles, par rapport à votre patronne. »