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ROSE ET NINETTE

tait l’œuvre et l’auteur ! Et ses méprisants haussements d’épaules pour l’espoir qu’il gardait encore ! Ensuite, au matin, quand les journaux arrivaient, dans ce tas de feuilles informées, hargneuses et perfides, comme elle allait à la pire pour lui signaler la ligne incisive, le passage blessant. Ah ! le mauvais compagnon de vie ! Elle pouvait bien s’enlever aujourd’hui, applaudir son petit Fagan ; il se réjouissait de rentrer tout seul, son Fagan, libre sous les étoiles, et de penser qu’elle rageait sans doute du succès qui se préparait, incontesté, fructueux, tel qu’il n’en avait jamais eu de son temps.

Quelques semaines après la représentation du Vaudeville, quand le nom de l’auteur s’étalait encore sur les porte-affiches et son portrait aux vitrines, les journaux annoncèrent le mariage en grande pompe à la mairie de la rue Drouot de M. La PosteroIIe, maître des requêtes au Conseil d’État, avec Mme  Ravaut. Deux ministres assistaient le mari ; la femme, deux académiciens, dont l’un lui avait déjà servi de témoin à son premier mariage, quelque dix-huit ans auparavant. Toilettes et jolies femmes. Après la cérémonie, les mariés recevaient dans leur appartement de la rue Laffitte.

« Sans mentir, demandait Mme  Hulin à son locataire en visite chez elle ce soir-là, ce qui