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ROSE ET NINETTE

les répugnances de la bonne société parisienne pour le divorce, elles le lui conseillaient toutes. « Non, non… Je resterai jusqu’au bout, jusqu’à la mort, pour mes filles !… » En réalité, elle manquait comme moi de griefs suprêmes, et sans les conseils de Malville… »

Un cri de l’enfant, plus fort que le premier, rompit encore leur conversation d’une brusque sortie de la mère, bientôt rentrée, mais très pâle, un peu d’effroi resté dans ses beaux yeux.

« Qu’est-ce qu’il a ? demanda Fagan.

— Rien, presque rien… Un cauchemar habituel dont il s’éveille en sursaut avec ce cri douloureux, ce cri d’angoisse. »

Son pauvre petit Maurice, si nerveux, si faible ! Elle se mit à parler de lui, de sa santé, de cette blessure au genou…

« Est-ce de naissance ? questionna Fagan, très pris par cette inquiétude maternelle, la plus profonde, la plus étreignante de toutes.

— Non, un accident… quand il était tout petit. »

Et elle ne parla plus, absorbée dans le souvenir cruel.