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des « appétits » dans la salade et parle du chapeau de cent qrrante francs que portait sa demoiselle au dernier Longchamp. Un couple délicieux et très admiré parmi nous. On se pâme aux gentillesses de Bébé, – comme dit sa mère, – à ses rires, à ses roulades, à ses envolements de jupe courte. On se presse devant la cour sablée de l’hôtel pour lui voir faire sa partie de crocket avec les petites filles et les petits garçons, – elle ne joue qu’avec les tout petits, – courir, sauter, envoyer sa boule en vrai gamin : « Je vas vous roquer, monsieur Paul. »

Tout le monde dit : « Elle est si enfant ! » Moi, je crois que ces faux enfantillages font partie d’un rôle, comme ses jupes à larges nœuds et son catogan de postillon. Puis elle a une façon si extraordinaire d’embrasser cette grosse Bordelaise, de se pendre à son cou, de se faire bercer, gironner devant tout le monde ! Tu sais si je suis caressante, eh bien ! vrai, ça me gêne pour embrasser maman.

Une famille bien curieuse aussi, mais moins gaie, c’est le prince et la princesse d’Anhalt, mademoiselle leur fille, gouvernante, femmes de chambre et suite, qui occupent tout le premier de l’hôtel dont ils sont les personnages. Je rencontre souvent la princesse dans l’escalier, montant marche à marche au bras de son mari, un beau gaillard, éblouissant de santé sous sou chapeau gansé de bleu. Elle ne va à l’établissement qu’en chaise à porteurs ; et, c’est navrant, cette tête creusée et pale derrière la petite vitre, le père et l’enfant qui marchent