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VII

PASSAGE DU SAUMON


En attendant une installation plus complète qui ne pourrait se faire qu’après l’arrivée de leurs meubles en route par la petite vitesse, les Valmajour s’étaient logés dans ce fameux passage du Saumon, où descendaient de tout temps les voyageurs d’Aps et de la banlieue, et dont la tante Portal avait gardé un si étonnant souvenir. Ils occupaient là sous les toits une chambre et un cabinet, le cabinet sans jour ni air, une sorte de serre-bois dans lequel couchaient les deux hommes, la chambre guère plus grande, mais qui leur semblait superbe avec son acajou attaqué par les tarets, sa carpette miteuse, frippée, sur le carreau dérougi, et la fenêtre mansardée découpant un morceau du ciel, aussi jaune, aussi brouillé que la longue vitrine en dos d’âne du passage. Dans cette niche ils entretenaient le souvenir du pays par une forte odeur d’ail et d’oignon roussi, cuisant eux-mêmes sur un