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L’ARLÉSIENNE.

eut regardé les lettres ; entrez boire un verre de muscat.

L’homme répond :

— Merci ! j’ai plus de chagrin que de soif.

Et il s’en va.

Le père rentre, impassible ; il reprend sa place à table ; et le repas s’achève gaiement…

Ce soir-là, maître Estève et son fils s’en allèrent ensemble dans les champs. Ils restèrent longtemps dehors ; quand ils revinrent, la mère les attendait encore.

— Femme, dit le ménager, en lui amenant son fils, embrasse-le ! il est malheureux…




Jan ne parla plus de l’Arlésienne. Il l’aimait toujours cependant, et même plus que jamais, depuis qu’on la lui avait montrée dans les bras d’un autre. Seulement il était trop fier pour rien dire ; c’est ce qui le tua, le pauvre enfant !… Quelquefois il passait des journées entières seul dans un coin, sans bouger. D’autres jours, il se mettait à la