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LETTRES DE MON MOULIN.

sort lentement… Un premier rayon frise déjà le toit du moulin. Au même moment, le tambour, invisible, se met à battre aux champs sous le couvert… Ran… plan… plan, plan, plan.

Le diable soit de la peau d’âne ! Je l’avais oubliée. Mais enfin, quel est donc le sauvage qui vient saluer l’aurore au fond des bois avec un tambour ?… J’ai beau regarder, je ne vois rien… rien que les touffes de lavande, et les pins qui dégringolent jusqu’en bas sur la route… Il y a peut-être par-là dans le fourré quelque lutin caché en train de se moquer de moi… C’est Ariel, sans doute, ou maître Puck. Le drôle se sera dit, en passant devant mon moulin :

— Ce Parisien est trop tranquille là dedans, allons lui donner l’aubade.

Sur quoi, il aura pris un gros tambour, et… ran plan plan !… ran plan plan !… Te tairas-tu gredin de Puck ! tu vas réveiller mes cigales.