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LE CURÉ DE CUCUGNAN.

« — Sainte croix ! Jésus, fils de David ! Aï ! aï ! aï ! est-il possible ?… Serait-ce un mensonge du grand saint Pierre ?… Pourtant je n’ai pas entendu chanter le coq !… Aï ! pauvres nous ! comment irai-je en paradis si mes Cucugnanais n’y sont pas ?

« — Écoutez, mon pauvre monsieur Martin, puisque vous voulez, coûte que coûte, être sûr de tout ceci, et voir de vos yeux de quoi il retourne, prenez ce sentier, filez en courant, si vous savez courir… Vous trouverez, à gauche, un grand portail. Là, vous vous renseignerez sur tout. Dieu vous le donne !

« Et l’ange ferma la porte.




« C’était un long sentier tout pavé de braise rouge. Je chancelais comme si j’avais bu ; à chaque pas, je trébuchais ; j’étais tout en eau, chaque poil de mon corps avait sa goutte de sueur, et je haletais de soif… Mais, ma foi, grâce aux sandales que le bon saint Pierre m’avait prêtées, je ne me brûlai pas les pieds.