Page:Daudet - Le Roman du chaperon rouge, Lévy, 1862.djvu/191

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de venir déjeuner, un de ces dimanches, dans les bois de Ville-d’Avray ; c’est là que je perche.

les rossignols.

Grand merci ; nous ne mettons jamais le bec dehors.

le rossignol.

Comment ! vous n’allez jamais courir les bois ? Vous passez votre vie dans ce grand clos, au milieu de ces arbres en deuil et de cette nature attristée ? Comme je vous plains !

les rossignols.

Ne nous plaignez pas, ami, nous sommes très-heureux. Dieu nous a doués d’une voix amoureuse et tendre, que nous employons à de pieux usages. Nous sommes les Rossignols du cimetière ; comme tels, nous avons ici deux fonctions. La première est de bercer le sommeil des pauvres gens enterrés à nos pattes ; nous devons leur chanter doucement, comme la mère aux enfants qui s’éveillent, et les rendormir au plus vite, afin qu’ils ne souffrent pas en songeant à ceux qu’ils aiment ; voilà pourquoi notre timbre est si doux, si voilé, si tendre… Chut ! quelqu’un a soupiré dans l’allée à gauche ; c’est la petite du coin qui se réveille. Allons, mes amis, vite un peu de musique ; et chantons-lui